un parti pour lequel tout le monde vote n'est pas un parti
Histoire de la révolution russe
Léon Trotsky
Le Comité exécutif
Un parti pour lequel tout le monde vote, hormis une minorité qui sait pour qui voter, n'est pas un parti, de même que le langage dont se servent les poupons de tous les pays n'est pas une langue nationale. Le parti socialiste-révolutionnaire apportait solennellement une dénomination à tout ce qui était prématuré, informe et confus dans la Révolution de Février. Quiconque n'avait pas hérité du passé prérévolutionnaire des motifs suffisants de voter soit pour les cadets, soit pour les bolcheviks, votait pour les socialistes-révolutionnaires. Mais les cadets se tenaient dans le camp retranché des propriétaires. Les bolcheviks étaient encore peu nombreux, incompréhensibles, même effrayants. Voter pour les socialistes-révolutionnaires signifiait voter pour la révolution dans son ensemble et n'engageait à rien. Dans les villes, c'était un effort des soldats pour se rapprocher du parti qui défendait la cause des paysans, un effort des éléments arriérés de la classe ouvrière pour se tenir plus près des soldats, un effort des petites gens des villes pour ne pas se détacher des soldats et des paysans. En cette période, une carte de membre du parti socialiste-révolutionnaire donnait un droit provisoire d'entrée dans les institutions révolutionnaires et gardait sa valeur jusqu'à échange contre un document de valeur plus sérieuse. Ce n'est pas pour rien qu'il fut dit du grand parti, qui entraînait les uns et les autres, qu'il n'était qu'un " zéro grandiose ".
http://www.marxists.org/francais/trotsky/livres/hrrusse/hrr12.htm